« La Minute de Lili » – La Préhistoire chez les PS/TPS

Cette année, avec les enfants, nous nous sommes lancés dans une grande aventure spatiotemporelle : nous sommes remonté aux origines de l’Humanité.

Tout d’abord, il a fallu réaliser que l’Homme n’a pas toujours peuplé la planète « Terre ».

Difficile à appréhender comme réalité à notre époque où l’humain a envahi le monde et se comporte bien souvent comme si ce dernier lui appartenait.

Pourtant nous n’avons pas toujours été les « maîtres du monde » comme me le rappela à juste titre Charles : « Quand les dinosaures existaient, il n’y avait pas d’hommes ! ». Les enfants ont alors évoqué la disparition des dinosaures. Heureusement ces catastrophes naturelles n’ont pas exterminé toutes les formes de vie. D’autres espèces ont réussi à survivre. Et quelle surprise de s’apercevoir que ce sont ceux qui paraissaient les plus fragiles (les petits mammifères notamment) qui ont pu faire face à ces défis. Nous nous sommes plongés dans la découverte du monde tel qu’il a évolué après cette fameuse extinction des dinosaures, en observant de nombreux livres documentaires richement illustrés. Feuilletant les pages à la recherche de traces des premiers hommes, les enfants ont affirmé tout de suite à la vue des images d’australopithèques qu’il s’agissait de nos lointains ancêtres. Qu’est-ce qui leur permettait de le deviner ? Mais c’était pour eux une évidence : « ils nous ressemblent ! ». Parmi tous les points communs évoqués, ils ont souligné leur démarche bipède qui les distingue des autres animaux.

Comme pour nous aujourd’hui, une des activités essentielle pour les premiers hommes était de manger. Mais la chose n’était pas si simple en l’absence de magasin d’alimentation ! Ils devaient donc trouver dans leur environnement direct de quoi sustenter leur faim.

Les enfants ont tout de suite pensé aux végétaux. Les fruits, les baies et les noix bien sûr. Mais en se référant à leurs connaissances sur les arbres, ils se sont souvenus que les jeunes feuilles étaient aussi parfois comestibles.

Par ailleurs, ayant regardé dans les moindres détails les dessins des livres mis à leur disposition, certains avaient repéré que des personnages semblaient chercher quelque chose dans le sol. D’autres rebondirent tout de suite sur cette nouvelle piste : « il y des légumes qui poussent sous la terre ». Même s’il ne s’agissait pas de pomme de terre, de radis ou de carotte, les premiers hommes avaient bien découvert que de nombreuses “racines” pouvaient être délicieuses.

Une autre hypothèse fut formulée : il y a des petites bêtes sur le sol que les hommes préhistoriques pouvaient manger. « Quoi par exemple ? ». Un enfant réagit : « Moi mes parents ils mangent des escargots !». Face à la stupéfaction de certains, d’autres confirmèrent l’information en citant les personnes de leur entourage qui eux aussi avaient déjà consommé ce gastéropode. Partant de là, pourquoi ne serait-il pas possible de manger aussi des vers ou des insectes ?! Je leur fis alors savoir, à leur grand étonnement (teinté à la fois de dégout et de curiosité), que, dans d’autres pays, les vers (lombrics, larves) ou insectes (criquets, cigales, araignée, fourmis etc.) étaient en effet, et encore de nos jours, des mets fort appréciés.

A force d’investigation sur ce que la nature pouvait offrir à l’Homme comme ressource alimentaire, ils pensèrent aux œufs. Mais, contrairement à ceux dont ils ont l’habitude, il ne s’agissait pas d’œufs de poules élevés dans un poulailler, mais d’œufs d’oiseaux sauvages. En effet, approuvèrent-ils, avec un peu d’agilité, nos ancêtres pouvaient sans doute grimper sur les arbres dans lesquels ils avaient aperçu des nids.

Quant à la viande, assurément les premiers hommes en consommaient, d’après nos petits paléontologues. Pourtant, il n’était pas si simple de s’en procurer…

Les enfants ont été surpris d’apprendre que les tout premiers hommes n’avaient pas les moyens de tuer du gros gibier. En effet, « comment feriez-vous pour tuer une bête ? » Les réponses fusèrent, presque aussitôt contrecarrées par la prise de conscience que nos ancêtres ne possédaient pas encore les outils évoqués : couteau, épée, fusil, arc et flèches. Comment abattre une proie à la seule force de ses bras ? Nous convînmes qu’il était bien trop périlleux d’essayer de s’en prendre à un lion par exemple ou même à un zèbre (certains expliquèrent de manière fort convaincante qu’un coup de sabot pouvait s’avérer très dangereux). En revanche, avec de la dextérité, il devait être possible d’attraper un animal de petite taille (rongeur, petit singe) ou un animal affaiblit (blessé, malade ou un jeune qui se serait éloigné de ses parents).

Nos déductions nous amenèrent à penser que les tout premiers hommes devaient surement avoir parfois la chance de tomber sur une carcasse d’animal mort. Mais, il fallait alors se dépêcher de consommer la chair, car l’odeur de l’animal mort risquait d’attirer d’autres charognards (vautours, hyènes) qui n’hésiteraient pas à se montrer violent pour s’emparer du « plat ». Pragmatiques, les enfants suggérèrent qu’il fallait, pour pallier à cette menace, couper la viande pour l’emporter au loin et la déguster en toute tranquillité. Excellente idée ! Mais avec quoi parvenir à la trancher ?! « Avec une pierre ! » répondit Augustin. Je leur ai alors présenté une grosse pierre pour que nous puissions statuer ensemble face à l’objet si l’opération escomptée paraissait envisageable. Le doute saisit notre petit assemblée ; mais Augustin ne se démonta pas et déclara que la pierre que j’avais proposée n’était pas bien car elle n’était pas coupante. N’importe qu’elle pierre ne pouvait pas convenir ! Nous avons joué à nous prendre pour des hommes préhistoriques, tandis que certains faisaient semblant de ramasser fruits, feuilles, racines, d’autres cherchaient des œufs, des escargots, des vers et des insectes, tandis que d’autres encore étaient en quête des précieuses pierres coupantes.

La prise de conscience de l’importance de ces fameuses pierres nous amena à cette réflexion: il serait fort pratique de pouvoir les fabriquer plutôt que d’avoir à en dénicher. Tout de suite l’idée leur vint de taper dessus pour rendre les côtés tranchants. Les enfants ont eux-mêmes expérimenté les diverses techniques envisagées : les taper contre le sol, avec un bâton, avec un autre caillou. Victoire ! Cette méthode leur a permis de détacher des éclats, ce qui rendait la pierre coupante.

Ce premier outil ouvrait d’autres possibles… On pouvait tailler un bâton pour rendre son extrémité pointue et s’en servir d’arme pour se défendre, mais aussi pour chasser. Pourquoi aussi ne pas attacher cette pierre tranchante au bout du bâton avec une corde faite dans une sorte de tige ou de liane ?

Un grand bond dans l’histoire venait d’être fait, les enfants s’imaginaient maintenant chasseurs munis de javelots, sagaies, lances. Ils se sont passionnés pour les diverses techniques de fabrications,  comme fixer des  “lames“ en broyant de l’écorce de bouleau pour fabriquer une colle ou en utilisant les boyaux et les tendons des animaux ou encore en confectionnant des lanières de cuir avec leurs peaux. Chasseurs, mais pêcheurs également ! Ils s’amusaient, tant dans notre pièce que dans le jardin, à faire semblant d’installer leurs tribus près d’un point d’eau, guettant les bêtes qui viendraient s’y abreuver, tout en essayant d’attraper quelques poissons à mains nues, avec une nasse, un harpon, un hameçon au bout d’un fil. Les filles ont révolutionné les normes en vigueur au temps préhistorique en revendiquant leur droit de participer à la chasse et à la pêche.

Une fois la question de la recherche des aliments résolue, la suite logique consistait à les manger. Pas de problème particulier à se représenter en train de consommer des fruits ou des légumes crus, mais, pour ce qui était des œufs et surtout de la viande et du poisson, il n’en était pas de même. Or, pour les cuire, il aurait fallu du Feu !

« Peut-on en trouver dans la nature ? » En réfléchissant ensemble nos petits chercheurs ont pensé à la lave (dans les régions volcaniques) mais aussi aux incendies causés par la foudre. A partir de là, il était possible d’enflammer un bout de bois pour s’approprier le feu. Mais, il ne fallait surtout pas qu’il s’éteigne. Cela ne fit qu’ajouter un peu de “tension“ à leur scénario de jeux : certains se désignaient gardien du feu tandis que d’autres partaient en mission pour chercher le bois nécessaire pour l’entretenir.

Les enfants avaient vu dans les livres qu’ils regardaient et re-regardaient avec passion que les hommes préhistoriques avaient appris à “faire“ du feu sans allumette, ni briquet mais avec des cailloux ou des bouts de bois. Ils ont donc rapidement joué à reproduire ces techniques pour faire naître des étincelles imaginaires et embraser les herbes sèches et brindilles soigneusement préparées par d’autres “membres du clan“. En vrai petits cuistots préhistoriques, ils se sont intéressés aux divers modes de cuisson possibles : grillé directement sur les braises ou sur des galets plats, à la broche, bouilli dans une outre en peau remplie d’eau dans laquelle on plongeait des pierres préalablement chauffées.

Les enfants ont réalisé que ceux qu’on appelle les hommes préhistoriques ont beaucoup évolué au fil des siècles, des millénaires… Et nos petits observateurs avisés avaient notamment bien repéré des décalages troublants. En effet, sur certaines images les hommes préhistoriques étaient représentés quasiment nus dans un environnement qui ressemblait à la savane, alors que sur d’autres ils étaient couverts de peaux de bête et de fourrures et se trouvaient sur des steppes enneigées. Ces deniers n’étaient en fait plus dans les mêmes régions que les précédents. Munis de grandes cartes du monde, les enfants ont refait avec des petites figurines le grand Voyage de leurs ancêtres, de l’Afrique jusqu’en Europe.

Nous avons alors parlé de l’ère glaciaire et imaginé la France, notamment, sous un climat beaucoup plus rude qu’aujourd’hui. Pour survivre, il fallait donc bien s’habiller chaudement. Mais aussi se construire des abris pour se protéger du vent, de la neige. Les enfants ont adoré jouer à bâtir leurs propres huttes avec toute sorte d’objets : tables, matelas, matériels de motricité en tout genre, cartons, couvertures etc., se fabriquer des cavités incroyables pour y installer leur campement (ils ont tout de suite bien compris qu’en revanche l’intérieur d’une grotte n’était pas un endroit très hospitalier : noir, humide et froid !).

Une faune inédite et impressionnante s’est invitée dans leurs jeux de rôle. Ils partaient désormais à la chasse aux rennes (munis de leur nouvelle invention : le propulseur), creusaient des pièges pour les mammouths. Une fois le gibier tué certains s’afféraient à préparer les peaux (l’équipe des tanneurs), que d’autres (les couturiers avec les aiguilles en os) assemblaient pour créer toutes sortes de tenues, d’autres encore taillaient les bois ou les défenses. Une nouvelle mission pour le groupe des cuisiniers était de constituer des réserves. Face à la masse considérable de viande que pouvait représenter un mammouth par exemple, il fallait trouver un moyen de la conserver pour plus tard. « Comment faire sans frigidaire ? ». Les enfants ont tout de suite eu l’idée de la mettre dans la neige ou la glace. « Mais quand il n’y en a pas ? ». Ils se sont approprié les ingénieuses techniques de leurs ancêtres : l’enterrer profondément, la plonger dans un torrent (en ayant pris soin d’ajouter des pierres dans le “sac“ pour qu’il s’immerge et de faire le nécessaire pour qu’il ne soit pas emporté par le courant), la faire sécher au soleil ou la fumer. Nous nous sommes d’ailleurs fait un petit en-cas préhistorique en mangeant des viandes fumées et séchées accompagnées de fruits secs. De quoi redonner des forces pour de nouvelles aventures à toute notre petite tribu.

Au cours de leurs péripéties, certains pouvaient faire semblant d’avoir été blessés par un coup de cornes, de griffes par exemple. Aussitôt certains de leurs camarades tentaient de les soigner en inventant toutes sortes de remèdes à base de plantes. Ils avaient appris de leurs ancêtres que la nature offre des ressources merveilleuses à qui la connait bien.

Les premiers hommes qui étaient en lien avec la Nature savaient combien elle était pleine de richesses dont leur survie dépendait et ils la respectaient : ils ne cueillaient et ne chassaient pas plus que nécessaire et sans doute la remerciaient-ils pour sa générosité. Etre reconnaissant de ce que la vie nous donne, quelle belle leçon !

Nous nous sommes penchés sur cet aspect plus spirituel, notamment en nous plongeant dans l’univers mystérieux des grottes ornées. Quelle signification pouvaient avoir ses peintures et ses gravures magnifiques ? Parmi toutes les grottes où ont été retrouvées des traces d’art pariétal, nous nous sommes particulièrement intéressés à la grotte Chauvet en Ardèche. Les enfants ont mimé sa découverte par Christian Hillaire, Eliette Brunel et Jean-Marie Chauvet.

Ils se sont imaginé déblayer des gravas pour se frayer un passage, s’enfoncer dans des boyaux souterrains, redescendre la falaise en toute hâte malgré la fatigue pour aller chercher des cordes afin de pouvoir atteindre une cavité au fond d’un précipice, découvrir fascinés à la lumière d’une frontale des traces d’ours des cavernes, puis celles laissées par des hommes il y a des milliers d’années. On a tremblé en se mettant à la place de nos trois spéléologues, craignant qu’entre deux explorations, d’autres qu’eux ne parviennent à pénétrer dans leur “caverne aux trésors“ encore tenue secrète. On a frémi en marchant sur des sacs- poubelle qu’on déroulait au fur et à mesure de notre parcours le long des “parois“ de notre classe comme l’avaient fait les trois amis dans leur grotte pour ne pas risquer d’abimer la moindre empreinte qu’auraient pu laisser les hommes préhistoriques.

Après avoir admiré les œuvres des artistes du temps passé, les enfants ont eux-mêmes réalisé de nombreuses créations : empreintes de mains, dessins et peintures de mammouths et rhinocéros laineux, ours et lions des cavernes, tigres à dent de sabre, bouquetins, rennes, chevaux sauvages sur papier mais aussi sur des écorces et des pierres. Ils ont également créé des sculptures en argile et en pierres (agencées les unes à cotés/au-dessus des autres).

Tous les parents ont pu profiter du fabuleux panel d’œuvres faites par les enfants lors d’une exposition qui les rassemblait et les mettait toutes en valeur dans leur diversité.

Les enfants se sont aussi confectionné des parures de chamanes : colliers et coiffes faits de coquillages, os de sèche, feuilles, cosses, brindilles et bouts de bois, décorés aux feutres acryliques. Cela donna lieu à une grande cérémonie où, après avoir revêtu leurs atours et s’être maquillés les bras et le visage avec des peintures (confectionnées par eux même à l’aide de poudres d’argiles, d’eau et de matière grasse), chacun est venu confier à la bienveillance des forces de l’univers ses vœux les plus chers. Après avoir défilé devant les plus grands, ils ont partagé avec eux en signe de fraternité entre tous les membres de la même et grande famille des Humains (issus d’une longue Histoire), leurs plats réalisés à base de fruits de saison et d’herbes du jardin.

Que nous avons appris, et surtout, que nous nous sommes amusés, en nous plongeant dans le monde de la préhistoire !

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